Historique du Studio Théâtre de Vitry

Historique du Studio Théâtre de Vitry

L’histoire du Studio-Théâtre est indissociable de l’invention, au début des années soixante, d’une politique culturelle municipale parallèlement au mouvement de décentralisation de la culture qui s’est accéléré dans toute la France dès les années cinquante, avec la création des premières Maisons de la Culture et des Centres Dramatiques Nationaux.

Le Studio-Théâtre de Vitry est né en janvier 1964 dans une cave de la Cité Louise Aglaé Cretté. A la demande d’un voisin, JACQUES LASSALLE qui loge dans la Cité entreprend d’y animer tous les samedis un atelier de théâtre avec des jeunes du quartier. Il y organise des lectures, des répétitions, des rencontres avec des professionnels, des sorties dans les théâtres parisiens.

Le maire de l’époque, Marcel Rosette, et son adjoint à la culture Jean Collet, lui proposent d’héberger son atelier dans le sein du tout nouveau Centre Culturel. Durant les deux années de travail qui suivent, le projet initial se transforme. Parmi la quinzaine de personnes qui fréquentent régulièrement l’atelier, un premier noyau permanent et bénévole se constitue (dont Lucien Marchal, Maddy et Paul Tanguy, Michel Leblond). Ils commencent à préparer de petits montages, mi-poétiques, mi-dramatiques, et présentent certains travaux…

Ce cheminement aboutit en mai 1966 lorsque ce qui n’était qu’un atelier parmi d’autres prend le nom de « Studio-Théâtre » (par référence au théâtre d’essai créé par Stanislavski en 1912 au sein du Théâtre d’Art de Moscou) et décide, sur l’instigation de la municipalité et du Centre Culturel, de se constituer en association autonome et de produire un premier spectacle.

Ce sera « La seconde surprise de l’amour » de Marivaux. L’unique représentation a lieu le 18 mars 1967, dans le Gymnase Henri Vallon aménagé par le scénographe Bernard Guillaumot. Elle a été préparée par un travail de porte à porte dans la ville, et par des rencontres et des visites dans les écoles et les entreprises industrielles. Un premier bulletin est publié (une douzaine de « Cahiers du Studio-Théâtre » seront édités de 1966 à 1979).

Un an plus tard, en février 1968, et dans le même gymnase, quatre représentations de « Barouf à Chioggia » de Goldoni viennent confirmer cette nouvelle orientation.

Peu après, ce sont les événements de mai 1968. A l’initiative de la municipalité le Centre Culturel décide d’organiser un certain nombre de spectacles à l’intention des travailleurs en grève. Sollicité, le Studio-Théâtre réalise un montage de textes (« Impromptu pour un mois de mai »), empruntés à Claudel, Artaud, Molière, Shakespeare, Pirandello, Genêt et Brecht.

Suit alors la création, en février 1969, de « Comme il vous plaira » de Shakespeare. Sept représentations, tout au long du mois. La compagnie abandonne le gymnase pour « Le Central », un cinéma désaffecté sommairement aménagé. Durant les mois qui précèdent les représentations, l’équipe organise des rencontres et dialogues dans les établissements scolaires, les maisons de jeunes, les entreprises, les amicales de locataires. La critique est invitée, la profession commence à s’intéresser au Studio-Théâtre…

Durant cette période le noyau permanent s’élargit à Jean-Pierre Jatteau (alors étudiant et futur Jean-Pierre Thibaudat), Maurice Audebert (professeur de philosophie au lycée Romain Rolland), Daniel Girard et Jean-Pierre Sarrazac (rencontrés au sein de l’Institut d’Études Théâtrales de Censier où Jacques Lassalle est chargé de cours), et Gérard Astor, qui prendra quelques années plus tard la direction du Théâtre Jean-Vilar. Bernard Dort, professeur et ami de Jacques Lassalle, suit attentivement les activités du Studio.

A partir de 1970 et parallèlement à ses propres créations, Jacques Lassalle confie à Gérard Astor et Daniel Girard la création de ce qu’ils ont appelé le « Théâtre à l’école ». Il s’agit de proposer des formes théâtrales légères dans les écoles, sur des sujets contemporains, accompagnées de rencontres et discussions avec les élèves.

Le théâtre Jean-Vilar est inauguré en 1972. Les spectacles sont désormais présentés dans une salle conçue selon les expériences scénographiques menées au sein du Studio-Théâtre par le premier scénographe de la compagnie, Bernard Guillaumot. Les créations se suivent d’année en année, la troupe se professionnalise et abandonne son travail pédagogique envers les amateurs. Le spectacle « Jonathan des années 30 », dont Jacques Lassalle est l’auteur, marque la fin de la démarche collective de la compagnie. Le Studio-Théâtre devient une structure de production et de création à part entière. A partir de la création de « Travail à domicile » de F. X. Kroetz en 1976, premier grand succès critique de la compagnie, Jacques Lassalle est de plus en plus sollicité par les théâtres Nationaux (Chaillot, Théâtre de l’Est Parisien, Opéra de Paris, Comédie Française), et les spectacles du Studio-Théâtre sont le plus souvent coproduits par des théâtres parisiens ou des CDN de la banlieue.

Jacques Lassalle est nommé à la direction du Théâtre National de Strasbourg en 1983.

Article de Jean-Pierre Thibaudat, in travail théâtral été 1975
Biographie de Jacques Lassalle

Mises en scène de Jacques Lassalle
produites par le Studio-Théâtre de Vitry, de 1967 à 1983 :

1967 : « La seconde surprise de l’amour » de Marivaux (gymnase Henri Vallon)
1968 : « Barouf à Chioggia » de Goldoni (gymnase Henri Vallon)
1969 : « Comme il vous plaira” de Shakespeare (cinéma Central)
1969 : « Bilora – La Parlerie » de Ruzante (salle Robespierre)
1970 : « Célimare le bien-aimé » de Labiche (salle Robespierre, Théâtre de Gennevilliers)
1971 : « Le rêve du Juge Pao » de Kuan han Chin (salle Robespierre, Théâtre de Gennevillers, Théâtre des Quartiers d’Ivry)
1973 : « Le Décaméron » d’après Boccace (Théâtre Jean-Vilar, Théâtre de la Tempête)
1973 : « Jonathan des années 30 » de Jacques Lassalle (Théâtre Jean-Vilar)
1974 : « Un couple pour l’hiver » de Jacques Lassalle (Théâtre Jean-Vilar)
1975 : « Le soleil entre les arbres » de Jacques Lassalle (Théâtre Jean-Vilar)
1976 : « Travail à domicile » de F.X. Kroetz (T.E.P., Théâtre Oblique et Festival de Nancy)
1976 : « Histoire de dires » de J.P. Thibaudat (Festival d’Avignon, Théâtre Ouvert)
1977 : « L’amant militaire » de Goldoni (Théâtre Jean-Vilar)
1977 : « Risibles amours » de M. Kundera (T.E.P., Théâtre Jean-Vilar)
1978 : « Théâtre de chambre » de M. Vinaver (T.E.P., Théâtre Jean-Vilar)
1978 : « Olaf et Albert » de H. Henkel (Théâtre de l’Athénée)
1978 : « Remagen » d’A. Seghers (TGP Saint-Denis, Théâtre Jean-Vilar)
1979 : « Les fausses confidences » de Marivaux (TGP Saint-Denis, Théâtre Jean-Vilar)
1980 : « Un dimanche indécis dans la vie d’Anna » de Jacques Lassalle (Chaillot, Théâtre Jean-Vilar)
1980 : « A la renverse » de M. Vinaver (Chaillot, Théâtre Jean-Vilar)
1982 : « Avis de recherche » de Jacques Lassalle (TGP Saint-Denis, Théâtre Jean-Vilar)


ALAIN OLLIVIER succède à Jacques Lassalle en 1983.

Comédien et metteur en scène, il participe occasionnellement depuis quelques années déjà aux projets du Studio-Théâtre, à différents titres : il a joué dans les spectacles « Ruzante » en 1969 et « Travail à domicile » en 1976, a créé le son de « Remagen » en 1978. Le Studio-Théâtre a produit en 1979 sa mise en scène de « L’échange » de Paul Claudel (Théâtre de Gennevilliers, puis Théâtre Jean-Vilar de Vitry).

Par ailleurs la ville de Vitry soutenait depuis longtemps déjà l’idée que le Studio-Théâtre puisse disposer d’un espace approprié au développement de son activité. En 1986 Alain Ollivier installe le Studio-Théâtre à deux pas de la gare de Vitry, avenue de l’Insurrection, dans un ancien atelier de ferblantier occupé alors par un chiffonnier, et confie les travaux d’aménagement à l’architecte Patrick Bouchain.

Sous sa direction le Studio-Théâtre prend une orientation nettement plus expérimentale. L’idée de laboratoire est née dans ces années de concentration et de recherche. Il est le premier à mettre en scène Thomas Bernhardt en France avec « L’ignorant et le fou » en 1983, et Nelson Rodrigues avec « Valse n°6 » en 1995. Il poursuit avec Pierre Guyotat, qu’il accueille en résidence d’écriture en 1987, une collaboration commencée dans les années soixante. Ses spectacles, programmés par les Festival d’Automne et d’Avignon, rencontrent un grand succès public et critique.

Alain Ollivier est nommé directeur du Théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis en 2002.

Biographie d’Alain Ollivier

Mises en scène d’Alain Ollivier produites par le Studio-Théâtre de 1983 à 2001 :

1983 : « L’ignorant et le fou » de Thomas Bernhardt (TNS, TGP Saint-Denis)
1984 : « Les Serments indiscrets » de Marivaux (Festival d’Avignon, Théâtre de l’Athénée)
1986 : « La Métaphysique d’un veau à deux têtes » de S.I. Witkiewicz (1er spectacle créé dans la nouvelle salle du Studio-Théâtre, coproduit par le Festival d’Automne à Paris)
1987 : « Bivouac » de Pierre Guyotat, en collaboration avec l’auteur (Festival d’Automne à Paris – Théâtre de la Bastille)
1989 : « A propos de neige fondue » de Dostoïevski (Théâtre de Gennevilliers, Théâtre Jean-Vilar, TNS)
1990 : « L’École des Femmes » de Molière (MC93/Bobigny)
1991/92/98 : « Les Bonnes » de Jean Genet (Studio-Théâtre de Vitry, tournée nationale et internationale)
Paul Claudel « Partage de Midi » 1993/94 (Studio-Théâtre de Vitry, tournée nationale et internationale)
1995 : « Valse n°6 » de Nelson Rodrigues (Théâtre 13, Paris)
1996 : « Ange Noir » de Nelson Rodrigues (MC93/Bobigny)
1997 : « La Révolte » de Villiers de l’Isle-Adam (création au Studio-Théâtre de Vitry,
reprise au Théâtre de la Bastille, tournée en France en 98-99)
1999 : « Toute nudité sera châtiée » de Nelson Rodrigues (création au Studio-Théâtre de Vitry, Festival d’Avignon 1999)
2001 : « Les Nègres » de Jean Genet (création au Studio-Théâtre de Vitry, puis en tournée, reprise au Théâtre Gérard Philipe en 2002)

Sous la direction d’Alain Ollivier, le Studio-Théâtre a produit et présenté les spectacles :

1993 : « Boltanski/Interview » d’après une émission de Jean Daive sur France Culture, mise en scène d’Éric Didry, (en coproduction avec le Festival Nouvelles Scènes de Dijon).
1999 : « L’Île des morts / Le gardien de tombeau » de Strindberg/Kafka, mise en scène de Frédéric Fisbach.

Pendant toute cette période, le Studio-Théâtre a accueilli de très nombreux metteurs en scène et comédiens venus répéter dans ses murs.


FRÉDÉRIC FISBACH succède à Alain Ollivier en janvier 2002.

Il poursuit et développe l’idée du Studio-Théâtre comme laboratoire de recherche permanent, régulièrement ouvert à des « spectateurs associés », et réintroduit la pratique amateur en instaurant les ateliers libres du jeudi soir.

Il associe au Studio-Théâtre les auteurs, comédiens et metteurs en scène Alexis Fichet, Pulchérie Gadmer, Benoît Résillot, Lucie Nicolas, Valérie Blanchon…

En 2006 il est nommé co-directeur avec Robert Cantarella du 104, lieu de création et de production artistique de la ville de Paris. Il est l’artiste associé du 61e Festival d’Avignon en 2007.

Il dirige le Studio-Théâtre jusqu’à fin décembre 2007.

Biographie de Frédéric Fisbach

Mises en scène de Frédéric Fisbach produites par le Studio-Théâtre de Vitry :

2002 : « L’annonce faite à Marie » de Paul Claudel (reprise au Studio-Théâtre du spectacle créé en 1996)
2002 : « Les paravents » de Jean Genet (création au Quartz de Brest, représentations au Théâtre National de la Colline, tournée nationale et internationale)
2003 : « Agrippine » de Vicenzo Grimani, livret de l’opéra de Haendel (Studio-Théâtre de Vitry)
2004 : « L’illusion comique » de Corneille (Festival d’Avignon, Théâtre National de l’Odéon, Studio-Théâtre de Vitry)
2005 : « Animal » de Roland Fichet (Théâtre Vidy-Lausanne, Théâtre National de la Colline)
2007 : « Feuillets d’Hypnos » de René Char (Festival d’Avignon)

Autres propositions et spectacles au Studio-Théâtre de 2002 à 2007 :

2000 : « C’est pas la même chose » textes de Pierre Louÿs, mise en scène de Benoît Résillot
2003 – 2004 : « Académie de l’interprète » formation de danseurs, sous la direction de Frédéric Fisbach et Bernardo Montet
2003 – 2004 – 2005 : « Aurélia Steiner » de Marguerite Duras, Chantier mené par Valérie Blanchon, – juin Séverine Batier, Pascale Nandillon et Nathalie Nambot
2003 : « Atelier de recherche Molière – Corneille »
2003 : « Écrits Bruts » Chantier mené par Giuseppe Molino et Laurence Mayor
2004 : « 13 metteurs en scène / 4 textes » atelier de mise en scène
2004 : « Lenz » de Georg Büchner, mise en scène Irène Bonnaud
2005 : « Foucault 71 » projet collectif de Sabrina Baldassarra, Stéphanie Farison, Emmanuelle Lafon, Sara Louis, Lucie Nicolas
2005 : « Les Histoires de Monsieur Nimportequi » de et par Wakeu Fogaing
2005 : « La Chanson de Roland » chantier dirigé par Hédi Tillette de Clermont Tonnerre
2005 : « 12 morceaux du Soulier » atelier de formation à la mise en scène
2005 : « Façades » de Nicolas Richard, mise en scène d’Alexis Fichet
2005 : « Cendrillon » de Robert Walser, lecture dirigée par Béatrice Houplain
2006 : « Projet Shônagon / acte1 » d’après les Notes de chevet de Sei Shônagon, mise en scène Sophie Pulchérie Gadmer
2006 : « Cavaliers vers la mer » de John Millington Synge, traduction et mise en scène Benoit Résillott
2006 : « Courtes pièces politiques » pièces courtes de différents auteurs, mise en scène Marine Bachelot, Alexis Fichet
2007 : « Il faut brûler pour briller » rencontres entre artistes américains, français, européens et libanais
2007 : « CATULLE MM VII » traduction et mise en scène Pulchérie Gadmer
2007 : »Plomb laurier crabe » texte et conception Alexis Fichet


Le Studio-Théâtre n’est à ce jour doté d’aucune archive. Cet historique très incomplet est en cours de réalisation. Il a été rédigé à partir de notes et commentaires trouvés dans les « Cahiers du Studio-Théâtre » publiés dans les années 60-70 (notamment un compte-rendu de Maurice Audebert en 1969), d’archives éparses et d’entretiens avec Jacques Lassalle, Jean-Pierre Thibaudat, Lucien Marchal, Gérard Astor, Alain Ollivier. Nous le compléterons et l’enrichirons de documents selon l’avancement de nos recherches…